Compte tenu du contexte sanitaire actuel et des règles de confinement imposées, de plus en plus de personnes se déclarent anormalement fatiguées, en particulier sur les réseaux sociaux. La plupart d’entre nous se demande comment cela est possible alors que nous sommes moins actifs qu’en temps normal. Voici les raisons pour lesquelles nous nous sentons plus fatigués et anxieux qu’en temps normal.
La fatigue peut également être mentale
Le sentiment de fatigue que nous ressentons en ce moment est davantage lié à la charge mentale associée à l’épidémie de COVID-19 et aux règles de confinement, plutôt qu'aux sollicitations physiques quotidiennes. En effet, la fatigue peut aussi bien avoir des causes physiques que mentales. Celles-ci représentent une modification de notre état psychobiologique, se manifestant de manière progressive et se traduisant généralement par une sensation d’épuisement et un manque d’énergie. Certains signes annonciateurs sont facilement identifiables, comme par exemple les changements d’humeur ou le renforcement de sentiment de frustration, même si ces derniers ne sont pas spécifiques aux états de fatigue mentale. Une baisse des capacités cognitives, telles que des difficultés à rester concentrer, constitue également un signe annonciateur.
De nombreux facteurs à l'origine de l'état de fatigue mentale
Plusieurs facteurs peuvent expliquer l’apparition de l’état de fatigue mentale :
De nombreuses études montrent que la fatigue peut être causée par le stress et l'anxiété. La propagation de l’épidémie nous rend confus et incertains. Tous ces sentiments peuvent conduire à une mauvaise qualité de sommeil, ce qui peut à son tour nous rendre plus fatigués et anxieux. Aussi, dans le contexte actuel, ce pourrait être la monotonie de la situation qui créé ce sentiment de fatigue. Par conséquent, faire face à la pression psychologique associée à l’épidémie pourrait nous épuiser.
L’état de fatigue mentale peut également être causé en partie par la répétition de tâches cognitives intenses et/ou prolongées. Il peut se manifester après seulement 60 minutes de sollicitation et se renforcer avec la durée et l’intensité de la charge de travail. En particulier, et malgré de nombreux avantages, le télétravail est propice à l’apparition de l’état de fatigue mentale. En effet, le télétravail tend à effacer les frontières entre vie professionnelle et vie privée en l’absence de plages horaires clairement définies. Il peut en résulter une perte d’efficacité, conduisant soit à une augmentation de la charge de travail pour réaliser une tâche en un temps donné, soit à un allongement du temps de réalisation de la tâche.
Au-delà du cas spécifique du télétravail, d’autres facteurs relatifs à l’activité professionnelle peuvent être sources de fatigue mentale. Par exemple, la possibilité de penser constamment au travail, notamment l’anticipation des éventuelles réorganisations à venir après le confinement, peut être source d’une charge mentale élevée et donc de pensées anxiogènes.
En cette période de confinement, d’autres sources de charge mentale peuvent se renforcer et se cumuler aux facteurs précédents. Par exemple, le temps dédié au travail scolaire des enfants, peut lui aussi s’avérer extrêmement chronophage et tout aussi épuisant. On peut ajouter l’assimilation répétée d’un flux continu d’informations lié à la situation sanitaire, ou encore l’augmentation du temps consacré à certaines activités en ligne (jeux, réseaux sociaux, services de streaming..), propices à une sursollicitation cognitive. Ainsi, l’écran peut facilement s’inviter dans nos activités professionnelles et extra-professionnelles sur une très large amplitude horaire, ce qui peut en retour fortement impacter notre sommeil. Une altération de la qualité de notre sommeil peut en retour rendre nos tâches professionnelles plus difficiles à réaliser.
La fatigue mentale peut amener à l’inactivité physique
Paradoxalement, si réaliser une activité physique est efficace pour prévenir l’installation de la fatigue mentale, il est également possible que cette dernière puisse compliquer un peu les choses… En effet, l’état de fatigue mentale pourrait modifier la concentration de certains neurotransmetteurs dans le cerveau (accumulation de l’adénosine et diminution de la dopamine, par exemple), pouvant conduire à une augmentation de la perception de l’effort et une diminution de la motivation associée. Par conséquent, un effort que l’on a l’habitude d’effectuer sera perçu comme plus difficile à réaliser. Si notre perception de l’effort dépasse notre motivation initiale, nous pouvons décider de diminuer l’intensité de l’effort ou même de l’interrompre par frustration.
Par Chris Hayot, docteur en ingénierie biomédicale
--
Sources :
Cox, R.C., Olatunji, B.O., A systematic review of sleep disturbance in anxiety and related disorders. J Anxiety Disord, 2016;37:104-29.
David A., Pelosi A., McDonald E., et al., Tired, weak, or in need of rest: fatigue among general practice attenders. BMJ, 1990;301(6762):1199‐1202.
Gruet M., Fatigue mentale : un facteur pouvant favoriser les comportements sédentaires en situation de confinement liée à la pandémie de COVID-19. 2020.
Kocalevent R.D., Hinz A., Brähler E., Klapp B.F., Determinants of fatigue and stress. BMC Res Notes, 2011;4:238.
Kuo B.C., Coping, acculturation, and psychological adaptation among migrants: a theoretical and empirical review and synthesis of the literature. Health Psychol Behav Med, 2014;2(1):16‐33.
Comments